jeudi 17 novembre 2011

4.



                                        Sinik-Autodestruction

Je suis vraiment ridicule de parler ici, et d'essayer de faire du vide de mon existence un petit quelque chose dont on se souviendrait avec le sourire. Je veux dire, faut que j'arrête de me faire des illusions, j'ai rien à dire sur la vie, sur le monde, mes yeux sont comme ces pierres qu'on ferre à des anneaux, et sont condamnés à ne voir sur le bout des doigts. J'ai pas le courage de me perdre pour batailler à trouver un chemin, creuser ma voie, tous mes pas sont le tracés d'un schéma bien établi.  Pourtant il y a au fond de moi, cette envie d'écrire qui me pousse à le faire, parce que sans expérience, je suis vouée à oublier les mots, car les mots ont besoin d'exister pour définir, pour trouver un équilibre avec le réel, pour individualiser le connu. Si je reste béate, immobile, crevante, sur le bord de cette route, il me faudra me contenter de l'aumône des autres poètes, qui passant, avec mépris, me jetteront leurs recueils à la gueule comme autant de regards qui ne sont pas le mien mais qu'il me faudra simplement envier. Je ne veux pas être une coquille creuse, qui font les sourires des enfants sur la plage, je veux pas être l'illusion des vagues,  je veux pincer l'oreille pour dire « regarde ! ». Ce ne serait pas un « regarde moi », je ne suis pas égocentrique en ce sens, je voudrais juste avoir assez de valeur morale et esthétique pour trouver la force d'exister, et donner de mon être à ceux qui ont besoin de voyager, de planter leurs yeux par le biais d'autres rétines. J'ai choisi la poésie, parce qu'elle dépassait le réel, elle se longe dans les limbes en attente de la Grâce.  Nous  sommes tous touchés par les beautés et monstruosités de la nature, ou de la nature humaine, et tout le monde est connecté par ces atavismes qu'il nous faut appréhender dans notre propre corps,  par notre propre expérience et celui qui écrit de la poésie, est capable du regard seulement, de créer son propre Dieu pour son propre monde. Je ne veux pas être aveuglée d'une lame que je n'aurais pas faite moi-même, ce n'est pas de la prétention, c'est le dernier recours à la folie, à l'angoisse, à la peur du néant. Sans écrire de la poésie, même médiocre, et largement inspirée, il m'apparait que je me noie, dans un assourdissant abysse, où il me semble que les autres ont plus le mérite de vivre que moi. J'entends ces autres beugler leurs certitudes, s'envelopper des idées à la mode, d'un langage préfabriqué, et si je ne pousse pas mon cœur à lutter contre cette conformité, pourtant si facile, je crois que je tombe en dépression. Je combats chaque jour aussi les gens qui pensent que j'ai un orgueil surdimensionné, parce qu'ils s'imaginent que vouloir de l'esthétisme dans ses dires, et un fond d'idéal humain dans la gorge font de toi une petit bourgeoise moyenne, apeurée de découvrir le monde.  Je dis pas que le facteur n'est pas existant, mais ce que je ressens aussi, c'est que j'ai eu des privilèges qu'il serait bête de renier. J'ai  à ma disposition des outils, une culture, je l'ai pas méritée, j'ai été élevée comme toute gosse d'enseignant avec des références plein la figure. Très tôt on m'a appris à lire, très tôt à écrire, je suis passive de ma propre destinée. Cette fâcheuse preuve d'assurance  serait encore excusable, si j'étais encore(peut être consciemment) ignorante de mon statut, et présumant de ma vie comme un cadeau très cher qu'il ne me faut pas mériter puisque c'est une chose en soi.  Mais une fois que quelque chose ou quelqu'un a posé le doigt dessus sans qu'il nous puisse être impossible de nous voir tels que nous sommes, nous ne pouvons pas rester inactifs, jouissant simplement du superficiel, et des brèves acclamations.  On se sent fautifs, et plus humains, et c'est comme ça comme devient bourgeois bohème.  Alors on essaye avec l'impression de faire mille efforts, de se mettre dans la peau d'un pauvre vieux, d'avoir une pensée régulière pour l'Afrique et d'acheter bio. Et ça m'énerve, d'être comme ça. Je veux dire, toi-même qui lit mon texte, et qui me pensera peut être mégalo ou incohérente, tu as un ordinateur, probablement un portable, tu peux consommer, et tu te dis dans le besoin, toi aussi je suis sure, refourguer un cours à un de tes collègues de classe te semble de plus en plus être une marque de gentillesse, alors que c'est rien, mais que nos échelles aujourd'hui sont totalement pourries par le gain et la perte.  T'écoutes du rap pour pas rester ignorante, mais même si t'as compris le concept, tu partageras jamais leur douleur, tu ne fais rien d'autre que dire que tu les écoutes devant tes potes, en prétextant les alarmer, mais dans le fond, c'était juste pour la causette, parce que ça te fait paraître moins con.  Je veux dire, pour qui on se prend sérieux pour se la jouer adulte, genre j'ai des avis, un regard sur le monde, alors que notre génération ne vit que des acquis de ses parents. On se vante de les emmerder d'emmerder le monde,  parce qu'il y a un nuage ambiant de rumeurs, qui a proclamé qu'être au dessus des autres par quelque qualité ou défaut, était mieux que d'être soi ! C'est nier l'évidence même du temps, du quotidien, du banal de la vie et de la mort, le refus total, idiot, de vivre dans la souffrance et le vrai bonheur. Ces gens ont mis des poches sur leurs têtes, du film plastique le long de leurs peaux, et ils essayent au maximum de ne plus rien ressentir, de se normaliser, d'éviter le tragique et la volupté. La poésie n'a aucun avenir entre leurs mains.  J'ai pas envie de devenir comme ça, même si je peux le voir que ce bonheur factice est facile à prendre de mon perchoir, et qu'il a des avantages bien sûr, mais pas l'essentiel. Je sais pas comment définir aujourd'hui l'essentiel, je sais pas si c'est spirituel, ou naturellement humain, mais je crois que si je devais le nommer en quelques mots, ce serait une volonté de connaissance du vrai et une approche de Dieu. Je veux oui souffrir, oui aimer, oui savoir. Et il n'y a que quand j'écris, quand je réfléchis sur la valeur du sentiment, de dieu et du bien, que je peux dire que j'existe, que j'ai trouvé une identité, et du corps à ma vie. Je suis désolée de l'incohérence de mon propos, je pense que rares sont les gens qui voudront bien me lire, je suis une parfaite incapable pour me faire entendre, mais dans tous les cas, voila en quelques mots le pourquoi de cet étalage de paroles sur un blog complètement paumé. J'ai profondément envie de réfléchir sur plein de questions, de mettre à nu ce qui me fait, pour avancer, et pourquoi pas trouver des gens qui ne jugeront pas mon écriture professorale et parfois péremptoire, avant d'avoir essayé de  comprendre le fond.  N'hésitez pas à la critique, s'il en faut car là j'avoue que je suis plus lyrique qu'engagée, au mieux, parlez-moi vous aussi de poésie.





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