jeudi 17 novembre 2011

19.


Watcha Clan- Les hommes libres


Nous marchâmes cent mille ans vers l'inconnu
Pour arriver au Palais du Sultan Assim Waldaba le second
Où gisaient les dernières ruines des temples Bretons,
Et le corps d'Achille complètement nu.
De fécondes fontaines jaillissaient de toutes parts pleines de sang,
Traversées de soleil, pleines de lumières, pleines de diamants.
Des orties, des fougères, des hibiscus, des vieux chênes,
De l'ocre sur les murs, des montagnes et des chats noirs qui miaulent
Sur ces gigantesques remparts où le lierre est comme la gangrène,
Et mange des pierres et mange des tôles.
La porte était massive métallique, plus imposante qu'a Jéricho
Et d'ailleurs nos pas sous ces édifices hurlaient mille échos.
Des bourrasques de vents emportaient nos cheveux,
Sur nos visages blêmes et perçaient nos yeux. 
Des taureaux malades et maigres pourrissaient un peu partout,
Des fosses communes s'ouvraient béantes sous nos pieds,
Des odeurs de Peste et de jonquilles émanaient de ces trous
Les fosses communes pouvaient nous avaler.
C'était un Palais Magnifique, mon ange.

Sur notre route s'étaient dressés de grands arbres secs
Des fruitiers de Provence, des sapins de Québec
Leurs troncs d'asphalte enveloppaient nos ombres,
Tandis que le soleil couchant mourait dans la pénombre. 
Au loin, dansaient cinq lunes dans l'espace, 
L'horizon était d'eau, de ruisseaux, d'océans, et sur leurs surfaces, 
Se reflétait, la pâleur sinistre de ces astres, 
Comme un suave linceul blanc.
Le monde n'était qu'une brume pleine d'or,
Terrible comme l''encens capiteux qui s'exhale des morts.
Comme des paillettes que la pluie aurait dissoutes. 
Par centaines, les pavots drapaient les bordures de notre route,
Et lorsque nous courrions, parfois, nos regards exaltés
Prenaient ces fleurs pour deux veines prêtes à éclater.
Les yeux portés vers les hauteurs nous laissaient contempler
Les nuées d'oies sauvages pénétrer dans les nuages,
Et se laisser dévorer,
Ainsi, les éclairs s'accouplent aux orages.

Je remarquai que nous n'avions plus de chaussures, plus de vêtements, plus d'argent, plus de pendule, plus de ressources, plus d'organes, plus de corps, plus de besoins, plus de désirs, plus d'envies, plus d'espoirs, plus de nostalgie, plus de légitimité, plus de droits, plus de devoirs, plus de souvenirs, plus de vie, plus d'objets, plus de capitalisme, plus d'idéologie, plus de religion, plus de dictature, plus d'usure, ...plus de travail, plus de musique, plus de beauté, plus d'humanité, plus de rancœurs, plus de voisins, plus d'imagination, plus de soleil, plus de passion, plus d'aurores, plus de sommeil...et nos pieds, nos pieds!! 
Sales, nos pieds de vagabonds, foulaient enfin pourtant le sol béni ,
Le royaume tant espéré,
Que Dieu nous avait promis
Souviens-toi.
Nous allons parler au coeur d'un désert plein de tempêtes, où le vent balaye tous les arbres, 
Fait chuter les oiseaux et les étoiles du ciel,
Fait tournoyer les voiles des bateaux les plus solides
Et dans un vacarme étrange où les tornades de sable remplissent nos bouches de silence,
Nous contemplerons au loin l'Horizon qui se meurt au gouffre d'un terrible vide.
C'est vainement que mes doigts arrachent mes cheveux pour que mes yeux puissent encore te voir. 
C'est vainement que la vie nous a poussé jusqu'ici.
Et entre chaque sanglot, et entre chaque mouchoir qui s'envolent comme des colombes blanches dans la nuit,
J'essaye vainement de survivre en me serrant contre toi.
Car le monde brûle sous de flamboyants éclats.
La vie n'a peut être pas conscience, sais tu, de nous avoir crées, 
D'être ainsi comme une mère que l'on dévore insatiables et sauvages
Mais en son sein humide, où resplendit la lumière dans de ténébreux nuages, 
La vie demeure sublime sous son corps décharné.
Elle est le premier souffle du nourrisson qui vient de naître,
Et le râle douloureux d'un vieillard dans son lit,
La beauté des aurores, le baiser froid des hivers, les peaux que l'on mord.
Un bienfaisant silence transpercé d'effroyables cris.
Tous nos gestes, toutes nos paroles, tous nos destins se confondent
En un espace infini où germent inutilement les fleurs les plus belles,
Où toutes les choses même les plus infimes sont fécondes,
Et s'épanouissent ensemble, immuables et mortelles.
Au creux de la vie, cet incessant et merveilleux voyage, nos yeux exultés 
Comme deux poignées d'arc en ciel greffées au visage de la peur
Se tournent vers l'infini de ce ciel où rayonne la lune et le noir argenté
A la recherche d'une Mère qui parait parfois nous avoir oubliés..
Mais dont on garde au fond de l'être un souvenir auguste et puissant,
Qui fait trembler le coeur, et bouilloner le sang.
La vie est sourde, mais sa voix se heurte à tous les coins du monde
Comme autant de mots d'amour qui s'enlacent et se répondent.
Et lorsque la glace vient couvrir nos corps immobiles,
C'est dans la chair, les vers, et le renouveau qu'instinctivement,
La vie se meut, comme un fleuve tranquille
Qui traverse le néant. 
Autour de nous, les obus et les comètes explosent tour à tour,
Les vagues se déchainent, la terre se brise comme de l'argile
Ton coeur en a fini de battre, ton regard est figé entre tes cils
Mais je te serre contre moi, mon tragique et mon unique amour,
Et tandis que les ombres et les spectres remplissent l'univers, 
Que l'obscurité s'étend comme un bouquet de lierres sur le sol,
Je reste à sourire, en embrassant furieusement tes lèvres molles,
Car il n'y a que toi pour donner à mes yeux tant de lumière.
Le cosmos est un ventre de femme où naissent les planètes,
Les étoiles, l'herbe, les ruisseaux et les pas des danseuses
La lune est très pâle, et ses rides creuses.
Le Soleil est un visage d'or poignardé de comètes,
Il y a des milliards d'Oiseaux qui le traversent, des feux de Bengale
Sur les rives des rivières, poussent des bambous enflammés,
Des Crocus humides, des bourgeons blancs et cent mille pétales
Qui se meurent à l'hiver, sous des vents enneigés. 
Les Dunes des Déserts s'embrassent sous des pluies de soleil
Tandis qu'ailleurs, le monde se noie sous des tonnes d'eaux
Les feuilles sont d'émeraudes, de givre ou de vermeille,
Les Lierres sauvages, en silence, étranglent les arbrisseaux. 
Les Lionnes dorment à l'ombre d'un Baobab,
Des grenouilles croassent dans l'étang d'à côté,
Un Tigre se meurt à la frontière du Penjab,
Grouillent les mille insectes qui vont le manger. 
Les Volcans sont rouges et les océans sont bleus,
La cime des arbres tranchent l'infini des cieux,
Les éclairs sont de cuivre, et les aurores de bronze,
S'enlacent à jamais, nos étoiles et nos yeux,
Tandis qu'ailleurs, dans des temples des bonzes
Répètent sans cesse les mêmes chants pieux. 
La nuit est un labyrinthe et ses murs sont opaques
Ses ombres se meuvent à la surface des lacs.
L'Univers s'éveille et s'endort dans la paume de mes mains,
L'Univers m'attriste et m'égaye, et je vis dans ses reins.

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